Chapitre
2
Un homme d’une trentaine d’années
attendait dans une petite salle d’attente. Il s’agissait de Daryl Blake, un Rangers travaillant à Jurassic World, de 36 ans, les cheveux
bruns. Il portait la tenue réglementaire des Rangers du parc. C'est-à-dire une chemise couleur caramel avec le
logo bleu du parc, accompagné d’un foulard bleu turquoise, un pantalon marron,
une paire de rangers et un chapeau caramel.
Soudain, une porte s’ouvrit brusquement
dans la petite salle. Les chaises en métal étaient collées au mur côte à côte
tandis que des magazines et des brochures reposaient sur une petite table en
verre, au centre de la pièce. Sur les murs beiges étaient accrochés différents
cadres dont un qui affichait la carte d’Isla
Nublar, montrant les différentes
infrastructures publiques et privées de l’île.
Daryl se tourna vers la porte qui venait
de s’ouvrir sur sa droite et reposa le magasine qu’il feuilletait sur la petite
table. Un homme, arabe, aux cheveux noirs, de faible corpulence, sortit de la
pièce d’à coté.
- Monsieur Blake, je présume ?
Daryl fit un geste de la tête pour
acquiescer et se leva, face à l’homme.
- Allez-y rentrez je vous prie, dit-il en serrant la main de son invité.
Daryl entra timidement dans le bureau
suivi par l’homme et retira son chapeau de Rangers
par politesse. Peter McGonha lui emboîta le pas et s’assit tout en priant Daryl
de s’assoir lui aussi.
Le bureau de monsieur McGonha était de
taille raisonnable, sentait le propre et était très lumineux. Jamais Daryl
Blake n’avait vu un aussi beau bureau de toute sa vie. S’il avait appartenu à moi, il serait très mal rangé et sentirait le
renfermé à coup sûr pensa-t-il avec humour. Tout était rangé, rien ne
trainait ! Aucune feuille, aucun crayon, aucun trombone, même pas une seule
poussière ! Des petits cadres étaient posés sur le bureau en bois vernis.
Daryl s’assit sur un fauteuil face à ce
dernier. Peter McGonha le fixait, assit sur sa chaise de bureau en cuir noir.
Que pensait-il ? Daryl ne le savait pas. Va t-il me remonter les bretelles ou essayer de me caresser dans le
sens du poil ?
- J’ai reçu votre lettre hier et je
voudrais en discuter avec vous monsieur Blake…
L’homme réfléchit un instant.
-Ecoutez vous êtes un de nos meilleurs
éléments et je ne peux pas vous laisser filer comme ça, ça serait complètement
naïf de ma part ! Dit-il.
Monsieur McGonha avait donc choisi de le
caresser dans le sens du poil. Il ne voulait visiblement pas laisser partir
Daryl. Cela faisait 6 ans que ce dernier travaillait ici. Daryl Blake était Rangers à Jurassic World, à aider, surveiller, et même sanctionner les visiteurs
qui ne respectaient pas le règlement du parc.
- Dites-moi, pourquoi voulez-vous
démissionner ? Quelque chose ne va pas avec nous ? Votre travail
est-il trop pénible ? Vous pensez ne pas être assez bien payé ?
L’interrogea l’employeur, visiblement très inquiet.
- A vrai dire je dirais un peu des deux.
Mon travail est vraiment épuisant et la chaleur n’arrange rien. En plus je
reste des semaines et des semaines ici, loin de ma famille…
Peter McGonha desserra un peu la cravate
de son costume et se gratta la tête. Il semblait vraiment inquiet.
Derrière lui, contre le mur, était attaché
un cadre. Il y était exposé une photo prise dans ce bureau, où l’on pouvait le
voir serrer la main de Simon Masrani, directeur de Masrani Global. Derrière les deux hommes, un asiatique les
observait. Il s’agissait de Henry Wu, le directeur d’InGen, également scientifique en chef du parc. Cette société, InGen, créatrice de Jurassic Park, avait été rachetée par Simon Masrani à la mort de
John Hammond, l’ex PDG d’InGen, en
1997. Claire Dearing, la directrice de Jurassic
World, se trouvait à côté de Wu. Tous souriaient. La tradition ou plutôt le
protocole…
McGonha réfléchît une nouvelle fois.
- Nous vous offrons pourtant Internet,
pourquoi ne l’utilisez-vous pas pour les contacter ?
Daryl Blake ne voulait plus travailler à Jurassic World. La plupart des
touristes ne le respectaient pas, jamais de merci, rien ! La chaleur
l’épuisait affreusement ce qui faisait atteinte à son moral et ce n’est
certainement pas la pauvre connexion internet de l’île et son petit appartement,
généreusement prêté par Masrani Global,
qui allait le lui remonter. La seule chose qu’il voulait c’était revoir sa
famille. Ses enfants et sa femme lui manquaient horriblement et il ne
supportait plus.
- C’est ce que nous faisons mais la
connexion n’est vraiment pas bonne, impossible de discuter une minute sans que
ça ne se coupe.
Daryl réfléchissait aux mots qu’il allait
employer.
De toute façon ma décision est prise monsieur
McGonha, je pars à la fin de la semaine.
Daryl Blake se leva mais fut arrêté par
son employeur.
- Attendez ! Nous sommes actuellement
en pleine période de Noël, notre fréquentation est quasiment à son maximum et
nous avons besoin d’énormément d’employés… Dit alors monsieur McGonha. S’il
vous plait restez au moins jusque mi-janvier, quand la fréquentation aura baissé !
En échange, nous vous proposons une prime de 500$.
Daryl réfléchit longuement. Que pouvait-il
faire ? Rester un peu plus longtemps
et obtenir la prime ou repartir et revoir sa famille ? Il se dit
soudain qu’avec ces 500$ il pourrait faire un cadeau à sa femme et à ses trois enfants. De toute façon qu’est-ce que 3
semaines comparé aux 6 ans qu’il a travaillé ici ?
- J’accepte votre proposition. Mais après
il n’y aura plus de négociations, je partirais. Définitivement. Suis-je bien
clair ?
Le visage de l’employeur s’illumina. Il
avait réussi et il en était fier. Il se redressa pour serrer la main de Daryl.
- Aucun problème. La société vous remercie
de votre gentillesse. Je ferais en sorte de parler de vous à monsieur Masrani.
Il regarde sa montre.
- D’ailleurs, il doit arriver demain.
McGonha baissa la tête et observa son
costume.
- Comment trouvez-vous mon costume ?
Demanda-t-il.
Daryl Blake fit alors le même geste que
son employeur pour observer le costume. Celui-ci était composé d’une veste
noire où était accroché son badge Jurassic
World qui indiquait son nom et son rang dans la société. Il portait
également une chemise blanche repassée avec soin qui lui allait à merveille.
Elle était rentrée dans son jean bleu avec sa ceinture en cuir. Enfin, Peter
McGonha portait des chaussures en peau de crocodile. Certainement pour impressionner ses employés.
- Elle vous va comme un gant monsieur
McGonha, répondit Daryl en souriant.
Il prît alors la direction de la porte
après avoir serré la main du chef des Rangers
de Jurassic World.
Il passa alors dans la salle d’attente
puis tourna vers le couloir qui menait à une des sorties. Daryl Blake arriva
dans un petit hall et salua Fanny, la secrétaire de Peter McGonha. Après une
brève discussion qui portait sur l’arrivée imminente du grand patron de Masrani Global, Daryl sortit du bâtiment
et se retrouva enfin dehors.
Derrière Daryl, l’immeuble abritant les
bureaux de Jurassic World, la tête
pensante du parc. Le lieu où toutes les décisions sont prises. Situé au
Nord-Ouest de l’île, dans la Restricted
Area, on y retrouvait les services de sécurité, du marketing, des
vétérinaires… C’est un immeuble d’une cinquantaine de mètres de haut avec de
longues baies vitrées qui le zèbrent.
Les architectes, Jules Hawse de Axis Boulder, James Palkey de Timack Construction, ainsi que Eli
Jacobs –le concepteur du projet- avaient contribué à définir l’architecture de
toutes les infrastructures du parc lors de sa construction de 2002 à 2004. Ils
avaient décidé, ensemble, qu’il était primordial que Jurassic World plonge le visiteur dans l’ère préhistorique en
créant des bâtiments aux matériaux rappelant la pierre et le bois mais avec des
formes modernes.
Le centre bureaucratique du parc était un
exemple très concret de ce parti-pris architectural. Les rebords des baies
vitrées étaient en bois provenant des arbres de la jungle d’Isla Nublar
qui ont était coupés pour créer de la place, réduisant ainsi les coûts et
créant un aspect plus naturel. La structure de l’immeuble était en béton avec
des parties bosselées rappelant la pierre et le préhistorique, et des parties
plus lisses et nettes pour le moderne.
Daryl Blake se trouvait à l’arrière du
bâtiment. Il faisait beau, chaud et le puissant soleil lui faisait plisser ses
yeux marron. Il remit son chapeau. Daryl se trouvait dans un petit espace où
des bancs en pierre étaient disposés autour d’une fontaine de taille moyenne.
Cet espace était lui-même entouré de fougères, de fleurs multicolores qui
produisaient un parfum agréable. Des arbres se dressaient par-ci par-là
derrière les rangées de fleurs et créaient des zones d’ombres fraiches. Tous
ces végétaux étaient encore humides suite aux pluies de la nuit dernière. Sur
le sol en macadam beige, les quelques flaques d’eau commençaient à s’évaporer
doucement.
A quelques mètres de là se trouvait le
parking des employés des bureaux. Daryl s’y était garé une demi-heure plus tôt
pour rencontrer une énième fois son employeur au sujet de sa future démission.
Peter McGonha semblait vraiment tenir à Daryl. Pourtant il n’était qu’un employé lambda parmi tant d’autres !
Pourquoi lui ? Finalement Daryl s’en fichait de l’attitude de son
employeur et de cette prolongation. Je
vais toucher une grosse prime et enfin retrouver ma famille, se pensa-t-il
pendant qu’il marchait pour rejoindre son véhicule de service.
Il déboucha enfin sur le parking et sortit
les clefs de la voiture de sa poche. Le porte-clefs Jurassic World produisait des cliquetis pendant que Daryl appuyait
sur le bouton d’ouverture du 4x4 Mercedes
Classe G.
Le véhicule était assez carré, de taille
raisonnable et suffisamment confortable pour que Daryl veuille le conduire. Il
était peint principalement en gris chromé qui le faisait briller avec le
soleil, faisant ressortir son trait horizontal bleu turquoise qui l’entourait
au niveau des lourdes portières. Enfin, un petit logo, un le crâne blanc d’un T-rex dans un cercle rempli de bleu
azur, était collé sur le trait au niveau des portières avant.
Le 4x4
Mercedes Classe G était réservé aux membres du personnel du parc qui
avaient besoins de faire des longs trajets sur l’île. Fruit du partenariat
entre Jurassic World et Mercedes Benz, 1 221 véhicules de
cette marque circulaient sur l’île que ce soit pour l’ACU, les vétérinaires, les Rangers…
Daryl Blake ouvrit la portière du
conducteur et entra en s’aidant de la petite marche noire attachée entre les
deux roues. Il referma la portière et entra ses clefs dans le contact. Puis il
sortit son portable de sa poche droite. Il appuya sur le bouton de
déverrouillage du téléphone.
- « Appel de Mike il y a dix
minutes », dit-il en lisant ce qui était écrit sur l’écran. Si Mike
m’appelle pendant la réunion ce n’est pas pour rien.
Daryl porta le portable à son oreille.
- Oui Mike ?... Oui, je vois que tu
m’as appelé pendant ma réunion, qu’est-ce qu’il y a de si urgent ?...
Daryl poussa un Pff d’exaspération.
- C’est pas possible, il le font exprès ou
quoi ?... Bien, ok, j’arrive, à tout de suite oui.
Il raccrocha et jeta le portable sur le
siège passager à sa droite. Mike l’avait appelé parce qu’il manquait quelqu’un
pour surveiller le Gentle Giant Peeting
Zoo, le mini zoo où les enfants pouvaient observer et toucher des bébés
dinosaures herbivores. Daryl se dit qu’il aurait mieux fait de refuser l’offre
de McGonha.
Qu’est
ce qu’il y a de plus soulant que cette attraction ? Rien. Même l'école maternelle de Kathleen –la fille de Daryl- était
beaucoup plus calme. Personne ne veut surveiller le Gentle Giant Peeting
Zoo, personne ! Y aller rimait avec
gros mal de tête à cause du brouhaha incessant des enfants, voix cassée à force
de crier à ces gosses qu’il ne faut pas donner à manger aux bébés dinosaures,
mal aux yeux en raison du déplacement rapide des enfants et enfin, le Compsognathus
sur le gâteau, la chaleur épuisante et écrasante qui régnait. Beaucoup de Rangers postés à cette attraction faisaient des
malaises à cause de la déshydratation, ce dit Daryl.
Il tourna le contact, faisant vrombir le
puissant moteur du 4x4.
- Bon, j’ai 10 minutes pour aller en
enfer.
*
Le 4x4 Mercedes Classe G de Darryl se gara
dans le parking avec les nombreuses autres voitures du personnel, dans une
petite zone réservée au personnel, à côté du T-rex Kingdom et près de Main
Street.
Il descendit, verrouilla le véhicule –même
s’il savait que personne ne pouvait le voler ici puisqu’ils se trouvaient sur
une île- puis se dirigea vers un large couloir à l’extérieur, bordés de murs en
taules beige, attachées à des poutres marrons foncées. Au bout du couloir,
Daryl apercevait un portail en bois qui ne servait presque à rien, à part pour
laisser passer les véhicules qui nettoient Main
Street la nuit, ou encore les camions de livraisons quand le parc est fermé
pendant de courtes périodes.
Daryl Blake atteint alors ce dernier et se
dirigea vers une petite porte à droite. Un autre Rangers, Sebastian Gonza, la gardait. Il portait la tenue
traditionnelle des Rangers de Jurassic World.
Celui-ci s’adressa à Daryl avec un petit
accent espagnol quand il approcha de lui.
- Bonjour capitaine Blake ! Comment
allez-vous avec ce temps radieux ?
Daryl eut un petit sourire.
- Oh ! Vous savez, même s’il fait
beau, on n’a jamais le moral quand on va à HellLand ! Dit-il prit d’un
fou-rire.
« HellLand » était le surnom
donné au très populaire Gentle Giant
Peeting Zoo. C’était l’attraction qui rencontrait le plus de succès, au
grand plaisir des Rangers… En
constatant cette influence record dans le parc, le service marketing et la
direction ont tout de suite sauté sur l’occasion pour sortir de nombreux
produits dérivés comme des jouets, des peluches, etc. Un dessin-animé était
même sorti il y a quelques années. Ce fut une réussite totale.
Elle avait ouvert en 2005. Les premiers
mois furent difficiles. Les pauvres petits animaux étaient victimes de stress
intense suite à l’excitation des enfants. Un bébé Apatosaurus et deux petits Gallimimus
avaient fait des crises cardiaques et d’autres souffraient de problèmes de
digestion parce que les enfants et les parents les nourrissaient avec des
aliments qu’ils ne supportaient pas. Le CA a due trouver une solution très
rapidement s’il ne voulait pas que GreenPeace
ou d’autres associations luttant pour le bien être des animaux ne se penche sur
le sujet. Elle fût alors fermée en 2006, pour laisser le temps de trouver une
solution. En 2007, elle ré-ouvrit et il fut alors choisi de durcir les règles
de l’attraction en interdisant les visiteurs de nourrir les animaux, le nombre
de visiteurs a était limité pour cette attraction pour éviter de stresser les
animaux et enfin les bébés étaient « formées » avant d’être
introduits.
Sebastian Gonza ne pu se retenir de rire
et ouvrit les deux portes du sas sécurisé. Daryl passa les deux portes et se
retrouva dans Main Street.
- Salut Sébastian ! On se revoit ce
soir d’accord ?
- Pas de soucis capitaine ! Répondit
l’employé à l’accent espagnol.
Pendant que celui-ci ferma la porte, Daryl
se retourna et fit face à un gigantesque squelette de Spinosaure !
Tout
doux le p’tit ! se dit-il ; comme s’il domptait le monstre. A
chaque fois qu’il passait ici –et Dieu seul sait combien de fois il passe ici
chaque jour- Daryl était stupéfait et émerveillait face à cet animal, a tel
point qu’il était devenu son dinosaure préféré, juste devant le Tyrannosaurus Rex.
Le Spinosaure mesurait en moyenne 5 à 6
mètres de haut grâce à sa voile. Ce carnivore et piscivore vivait durant le
Crétacé et pouvais mesurer jusqu’à près de 18 mètres de long. Le Spinosaurus est très reconnaissable en
raison de son crâne qui ressemble énormément à celui du crocodile avec ce long
museau qui servait à attraper les poissons dans les rivières, et également avec
cette voile –ou crête- qui lui traversait le dos de tout son long.
Le squelette du dinosaure dominait les
nombreux visiteurs qui faisaient leurs achats dans Main Street. Plusieurs
personnes se prenaient en photo devant le colosse, d’autres s’asseyaient pour
trouver de l’ombre et se reposer.
Le capitaine Daryl Blake s’approcha de
lui, son chapeau sur la tête, lunettes de soleil sur le nez. Il tenta de se
frayer un chemin dans la foule compacte.
- Regarde maman, le monsieur a le chapeau
d’Indiana Jones ! Dit un garçon
lorsque Daryl le frôla.
Celui-ci se retourna et ne pu s’empêcher
de sourire. Le petit garçon, âgé d’environ 7 ans, le fixait, bouche bée,
impressionné. Il se colla à sa mère qui le prît dans ses bras.
Daryl avait beau dire ce qu’il voulait sur
les enfants au Gentle Giant Peeting Zoo,
il n’empêche qu’il les adorait. C’est même pour cette raison qu’il en avait 3.
2 garçons et 1 fille : Steven, Colin et Kathleen. Il les adorait plus que
tout au monde. Ils lui manquaient énormément, il n’avait même pas pu les voir
grandir. Steven avait déjà 8 ans, Colin 6 et Kathleen 5. A chaque fois qu’il
les voyait, ces derniers couraient et bondissaient vers lui, le sourire aux
lèvres. La joie les prenaient tous, les enfants et les parents. Mais ces
moments étaient trop courts et ne duraient que 2 à 3 semaines maximum. Ça peut paraître long quand on dit « 2
à 3 semaines » mais non, c’est affreusement court, pensa Daryl. Et la
séparation… Elle est horrible, déchirante. Colin et Kathleen pleurent tous les
deux dans les bras de leur père. Andrea, sa femme, est presque au bord des
larmes elle aussi. Quant à Steven, il ne pleure pas, fait le dur, mais Daryl sait
très bien qu’au bout de quelques jours à peine, il pleure en cachette, à l’abri
des regards.
Daryl Blake ne supportait plus ces moments
troublants, qui lui montaient à la tête tous les jours depuis 6 ans. C’est pour
ça qu’il voulait démissionner et retourner chez lui avec ses enfants et sa
femme, à Washington. Il travaillerait
au zoo, il ferait moins chaud et il verrait sa famille tous les jours. Matins
et soirs. La belle vie quoi.
Il fût alors chassé de ses pensées par une
femme, portant son sac à main avec l’intérieur du coude. Elle s’excusa et
partit comme elle était arrivée. Il continua la traversée de Main Street, il devait aller juste en
face pour rejoindre une petite rue qui le mènerait à l’attraction. Après avoir
bousculé plusieurs personnes –et excusé, évidemment- et croisé 3 collègues en
patrouille, il atteignit enfin son objectif. Cette rue était moins bondée mais
quelques visiteurs allaient et venaient sous le soleil implacable.
Après quelques mètres à marcher, l’entrée
du Gentle Giant Peeting Zoo lui
faisait face. Mon Dieu ! La
situation est pire que je ne l’aurais imaginé ! Se dit-il en observant
l’immense file qui s’étirait bien avant l’entrée. Plus loin dans la rue Daryl
pouvait voir le Centre Aquatique avec
ses nombreuses piscines et toboggans. L’attraction semblait elle aussi victime
de son succès. Une longue file d’attente s’étendait jusqu’à se mêler à celle du Gentle Giant Peeting Zoo. Pas étonnant avec cette température, tout le
monde veut se rafraîchir.
L’entrée de l’attraction des bébés
dinosaure était assez sympathique au goût de Daryl. De faux rochers beiges
formaient une sorte de voûte. Quelques petites lianes tombaient et serpentaient de cette structure en béton armé. Un panneau de 2 mètres de haut, situé à
gauche de l’entrée, indiquait les règles de l’attraction dans différentes
langues, avec des caractères blancs sur fond bleu turquoise. A droite avait été
installé un panneau informatif qui diffusait en temps réel le temps d’attente pour
l’attraction. Il indiquait pour l’instant 45 longues minutes pour les
touristes.
Le capitaine Blake avança à la rencontre
des visiteurs.
- S’il vous plait, collez vous bien contre
le mur situé sur votre droite pour bien laisser circuler les autres personnes,
merci !
Sa voix était assez apaisante même s’il
elle laissait paraître un peu de fermeté. Si
tu ne leur montres pas qui domine, alors c’est eux qui te domineront.
C’était la phrase qu’avait prononcé son formateur quand il avait été embauché
il y a 6 ans. Et il avait raison ! Les gens ont tendance à se prendre pour
des rois mais ils oublient les règles de sécurité. Ils pensent qu’elles sont là
que pour punir et payer des amendes alors que, sans elles, ça serait l’anarchie
dans le parc…
Tout le monde se colla contre le mur,
certains sans discuter d’autres en grognant que ce n’est pas normal car non
seulement on les fait patienter longtemps sous le soleil, et en plus parce
qu’on leur donne des ordres. Je ne
comprends pas, je l’ai dit gentiment et poliment mais ils ne sont pas contents.
Si seulement il existait un manuel, un guide sur les visiteurs… Pensa-t-il
en s’approchant de la voûte en fausse roche.
Il doubla en suite la file dans le petit
chemin qui zigzaguait dans une petite végétation et passa sur la gauche du
tourniqué qui permettait de réguler le flux de touristes dans l’attraction. Il
entendit alors quelques plaintes derrière son dos et fit mine de n’avoir rien
entendu. Le chemin s’élargit enfin et il déboucha dans un grand espace où tout
le monde se bousculait contre les barrières en verre et en bois.
Daryl décrocha le talkie-walkie qui
portait à sa ceinture et le porta à sa bouche. Il appuya sur un bouton qui
produisit un petit grésillement.
- Mike ? Ici Daryl, tu me
reçois ?
- Oui je vous reçois capitaine, lui
répondit une voix assez grave.
- Arrête de m’appeler
« capitaine », je pense que tu me connais assez pour m’appeler
« Daryl », dit-il fermement.
- Je sais, je te charrie c’est tout, lui
indiqua Mike en rigolant.
Daryl poussa un Pff pour montrer que ça ne l’amusait pas.
- Tu te trouves où ? Demanda-t-il.
- Euh… Juste à l’entrée de la zone où se
trouve le mini-zoo.
- Ok, reçu, je te rejoins.
Daryl lâcha son doigt du bouton et un
second grésillement retentit. Il prît ensuite la direction indiquée en longeant
une petite file qui s’était formée pour toucher, caresser les bébés dinosaures.
Il arriva au bout de la file et fut
accueillit par Mike. Il portait la même tenue que Daryl sans les épaulettes
marron car elles étaient réservées aux capitaines. Il ne portait pas non plus
de chapeau, exhibant alors son crâne luisant au soleil. Ses lunettes de soleil
avaient de fines branches noires métalliques, un peu comme celles que portes
les soldats américain dans des films sur
la guerre du Vietnam. Ses verres
noirs ne laissaient paraître que le reflet de ce qu’il voyait, c’est à dire
Daryl.
Pendant que celui-ci s’approchait de lui,
Mike ouvrit grand les bras.
- Voila le patron ! Dit-il si fort
que les deux visiteurs qu’il avait autorisé à passer, un père et son jeune fils, se retournèrent étonnés.
- Non, le patron c’est McGonha, pas moi.
Répondit Daryl, impassible.
- Tu veux dire cet arabe, qu’on voit
partout sur les photos pour la direction alors qu’il n’est jamais sur le
terrain ? Il vient d’où déjà ?
- Irak
mais il est né aux Etats-Unis.
Daryl avait les mains sur les hanches et
regardais autour de lui, guettant la moindre anomalie, le moindre problème.
- Paradoxal. Y a pas à dire, les irakiens
sont fait pour les diktats, fit Mike, arborant un large sourire.
- Et bien, c’est la fête de l’amalgame dit
donc, lui rétorqua Daryl, visiblement pas amusé par la boutade.
- Allez ! Un peu d’humour bon
sang ! Qu’est-ce qu’il y a ? Saddam Hussein a refusé ta
démission ?
- Ecoute Mike, je ne suis pas la pour
rigoler… Mais oui il a refusé en me proposant quelques semaines –ou mois- de
plus en échange d’une bonne prime. Je ne sais pas comment je dois le prendre.
- Si t’as une prime, c’est forcément
bon !
Mike frappa sa main contre l’épaule de
Daryl et le secoua en signe de réconfort.
Les deux Rangers se tenaient debout, faisant passer les visiteurs. Ils se
tenaient face à la petite « cour » pleine de poussière. Elle était en
arc de cercle et des arbres étaient plantés à quelques endroits.
C’était l’anarchie ! Les enfants
couraient partout, d’autres sautillaient, il y en avait même un qui courrait
après un bébé Gallimimus. Le pauvre
essayait de fuir à ce prédateur, pourtant âgé de 8 ans, en zigzagant à travers
les autres enfants et autres bébés Apatosaures
et Tricératops. Ailleurs, des enfants
chevauchaient des bébés Tricératops
scellés pour l’occasion. Les enfants semblaient heureux, caressaient leurs
montures sous la collerette les faisant pousser des petits bruits de plaisir et
secouer leur petite tête avec une corne au centre. Un bébé Apatosaure se
faisait caresser son long cou à la peau reptilienne, il frotta ensuite sa
petite tête contre l’épaule de la petite fille. Elle regardait ses parents avec
un grand sourire et continuait à caresser le dinosaure.
Et dire que dans quelques mois il sera
géant ! Se dit Daryl en observant la scène. Finalement malgré l’anarchie qui régnait dans la « cour »,
les enfants, les dinosaures et les parents avaient l’air heureux. Sauf eux, les
employés. Pourquoi ? Les conditions de travail… Et ça ce n’était pas
précisé sur les brochures distribuées aux visiteurs, ni sur les fiches de recrutement.
Soudain, un cri. Celui d’un enfant. Daryl
scruta la « cour » de gauche à droite, de dinosaures à enfants. Son
regard s’arrêta sur un garçon pleurant et se frottant le genou droit. Ses
parents accoururent, paniqués.
- Ne courrez pas s’il vous plait !
Vous allez faire paniquer les animaux, cria Daryl en s’approchant d’eux.
Ils se mirent alors à marcher d’un pas vif
vers leur progéniture, qui les regardait les yeux larmoyants.
Que s’était-il passé ? Daryl ne le
savait pas mais il n’y avait rien de grave.
En tout cas pour l’instant…
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